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Une façon originale d'aborder les problèmes pour prendre des décisions plus conscientes

Une façon originale d'aborder les problèmes pour prendre des décisions plus conscientes

Points clés : 

  • En gros, il existe deux types de problèmes : complexes ou simples.

  • La stratégie pour résoudre un problème dépend de notre manière de l'appréhender. Il est important de savoir adapter la méthode à la nature du problème.

  • L'approche pour résoudre un problème simple est cartésienne, en prenant en compte les éléments connus pour atteindre un état idéal.

  • L'approche pour résoudre un problème complexe ne permet pas de viser l’idéal car il n’existe pas. Un progrès est cependant possible.

  • Au final, il y a 3 stratégies : fin - moyens (cartésienne), moyens - fin déterminée et moyens - fin émergente.

Comment appréhendons-nous les problèmes ? Savons-nous adapter la méthode à la nature du problème ? Selon le cas, la stratégie dépendra de notre manière d'appréhender toute la situation ou seulement une partie.

Il existe plusieurs définitions d’un problème. Selon le dictionnaire Robert, il s’agit d’une difficulté qu'il faut résoudre pour obtenir un résultat ; situation instable ou dangereuse exigeant une décision. Nous proposons de définir un problème comme une situation perçue qui incite à se positionner par une décision. Ex : j'ai mal au pied, je décide de me faire soigner. Choisir de ne rien faire, c’est aussi décider.

Notons que cette définition est inédite et semble suffisante. Elle a l’avantage de ne pas intégrer la cause (par exemple, pourquoi j’ai mal au pied) ou l'effet (l’empêchement occasionné par le mal au pied) dans la description du problème. L’avantage de ce minimalisme tient au fait qu’intégrer une cause ou un effet induit des biais, notamment le biais de focalisation ou d’ancrage. Ce biais cognitif est un phénomène psychologique qui affirme que la première information que nous recevons sur un sujet spécifique sera celle que nous prendrons comme base pour mémoriser. De plus, les causes et les effets d’un problème sont très souvent multiples voire innombrables et l’ensemble est inconnaissable. 

C’est le cas des problèmes complexes que nous pouvons aussi définir comme une situation perçue, constituée d'éléments interagissant, dont certains sont inconnaissables, qui incite à se positionner par une décision. 

Face à un problème et avant de prendre une décision, nous proposons de prendre en compte 3 dimensions : philosophique, stratégique et méthodologique.

Aspects philosophiques basés sur notre
représentation du monde

Est-ce que j’assume que la situation est complexe ou pas ?

1. Je pense que la situation n’est pas complexe

Je considère alors qu’aucun élément n’échappe à ma connaissance. Le tout peut alors se décomposer en parties afin de le simplifier. C’est parce que je dispose de toutes les informations que je peux viser un état idéal qui devient mon objectif. En d’autres termes, je sais dire quelle sera la meilleure solution. Il s’agit là d’une approche cartésienne de la situation et un rétroplanning est possible à partir de l'objectif fixé c’est-à-dire la complète résolution.

Par exemple, mon avion consomme trop (situation perçue). Je souhaite concevoir un avion qui consomme moins (je me positionne par une décision). Je m'appuie sur la mécanique de vol (portance, frottements, …) associée aux connaissances sur la propulsion énergétique qui rendent possible le développement de ce nouvel avion.

2. Je reconnais que la situation est complexe

Je ne peux pas tout connaître et donc une solution optimale n’a plus de sens. Je peux néanmoins comparer la situation perçue avec la situation souhaitée, si celle-ci est atteignable et satisfaisante.

  • Par exemple, les Ukrainiens sont en difficulté. Je peux organiser une collecte de ressources dans mon quartier. Est-ce que cela résout tous les problèmes des Ukrainiens ? Certainement pas, mais c’est faisable (effet direct atteignable) et c’est mieux de le faire que de ne pas le faire. En d’autres termes, il n’y a plus d’idéal comme dans le cas d’une information parfaite mais il reste la possibilité de comparer deux à deux les effets.

  • Par exemple, une collecte de ressources physiques sera plus adaptée qu’une collecte d’argent car le système bancaire fonctionne mal dans certaines localités du fait de la guerre. Je ne peux plus parler de solution puisque le problème continuera d’exister. Je peux parler d’amélioration « satisfaisante » au regard de la situation initiale.


Aspects stratégiques

L’approche stratégique s'aligne sur l’approche philosophique choisie. 

Stratégie n° 1 : Avec le cartésianisme, je décide de l'état idéal désiré. Je peux viser la suppression du problème, c’est-à-dire sa solution complète.

Il existe différentes stratégies comme :

  • L’analyse des causes (approche fin-moyens).

  • L’analyse des contraintes.

  • L’essai-erreur.

En assumant le fait de ne pas tout connaître, deux autres stratégies sont alors possibles :

Stratégie n°2 : Je me fixe un objectif. Dans ce cas, on parlera d’Effectuation guidée par l’objectif ou d'une analyse moyens - fin. Par exemple, la fin visée est de diminuer ma consommation de carburant de 30 %. Tout progrès vers le but est considéré comme valable. Puisque l'avion consomme trop, je décide de l'utiliser moins.

Stratégie n°3 : Je ne me fixe pas d’objectif a priori. Dans ce cas on parlera d’Effectuation “vraie” ou non guidée puisqu’aucun objectif n’est privilégié. On parle aussi de l’analyse des effets du problème sans but préalable. Je recherche toute action parmi plusieurs effets qui représente un progrès satisfaisant. Par exemple, une trop grande consommation (moyen) augmente la production de C02 (effet). Je décide d'investir en R&D pour embarquer des capteurs solaires dans l’avion. Je choisis ce qui me satisfait parmi plusieurs effets possibles du problème.

En résumé, il y a 3 stratégies : fin - moyens (cartésienne), moyens - fin déterminée et moyens - fin émergente.

Aspects méthodologiques

La plupart des méthodes s'inscrivent dans la recherche d'un état idéal ou d’un optimum. Seules les méthodes effectuales s’en affranchissent et privilégient une action satisfaisante. Les méthodes issues du cartésianisme répondent à des situations particulières variées comme par exemple la méthode Triz qui permet d’optimiser une solution en considérant plusieurs contraintes. C’est aussi le cas des méthodes agiles qui visent à réduire un effort de développement qui pourrait s'avérer inutile au regard d’une fin souhaitée. Sans remettre en cause leur utilité, nous proposons des méthodes alternatives qui partent du présent et grâce à l'Effectuation révèlent et multiplient les possibilités d'améliorer la situation.

Le complexe invite à considérer les problèmes avec humilité tout en révélant des possibilités d’action inédites satisfaisantes. C’est aussi une invitation à reconsidérer les pratiques dominantes issues d’un réductionnisme qui peut parfois être dangereux. Quand la stratégie fin - moyens nécessaires (ce que je dois faire pour) est impossible du fait d'une information imparfaite, la bascule vers une stratégie moyens - effets (ce que je peux faire avec les moyens disponibles certains) permet d'agir en étant satisfait, alors que je ne sais pas tout.